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Les indices de confiances météo

Par Bruno Bouchard

 

La prévision à 10 jours est une réalisation Européenne. Chaque pays a le choix de la diffuser ou non. Certains le font en partie (comme la France ou la Suisse), d'autres préfère l'utiliser seulement à des fins commerciales (l'Allemagne). La France a choisi de diffuser la prévision jusqu'à 7 jours en définissant un indice de confiance. Cela n'a pas été simple car Météo-France ne savait pas trop comment cet indice allait être interprété... Comme on va le voir, il ne s'agit pas vraiment d'une probabilité.

Tout repose sur une nouvelle façon de faire la prévision à moyenne échéance. Quelque soit l'échéance, notre atmosphère et ses mouvements sont modélisés sur un super calculateur. Pour cela, on découpe l'atmosphère en petit cube. Les cotés de ceux-ci sont plus petits pour des échéances faibles et plus gros pour des échéances moyennes : par exemple, environ 10 km de coté pour la courte échéance, 120 km pour la moyenne échéance. L'épaisseur est variable avec l'altitude.

Pour initialiser un modèle, il faut connaître l'état de l'atmosphère à l'origine (aujourd'hui à 0h00 pour prévoir pour les jours à venir). Et c'est là que le bas blesse ! Car nous n'avons pas une image parfaite de l'atmosphère à 0h00 : ainsi, la densité de postes d'observation est plus forte en Europe qu'en Afrique ou que sur les Océans. Il faut donc extrapoler les mesures sur une grille (les petits cubes ci-dessus).

Or il existe de nombreuse façons d'extrapoler, toutes aussi valables les une que les autres. On sait également que ces extrapolations donnent une plus forte variabilité sur certains points du globe (les Océans par exemple) plutôt que sur d'autres (la France puisque la densité des observations y est importante).

En conséquence, on peut réaliser informatiquement plusieurs extrapolations, donc plusieurs prévisions ! C'est ce qui est fait depuis cette année (1998), et ce, tous les jours. On dispose donc d'une prévision réalisée avec un modèle à maille fine (on va dire un point tous les 120 km) et on réalise 25 prévisions avec des extrapolations en un sens puis 25 prévisions avec les extrapolations symétriques, mais avec un modèle à maille moins fine (on va dire tous les 150 km - c'est le modèle que l'on utilisait encore en 1997).

Le prévisionniste dispose donc de 51 prévisions.

Une moyenne du tout est faite : on parle désormais de la Prévision d'Ensemble. Elle donne une image du flux général (d'où une prévision qui donne les grandes tendances à défaut de pouvoir être plus précise). Ensuite, on recherche les éventuels "éléments" les plus éloignés de cette moyenne (par un calcul de distance en n dimensions correspondant au nombre de points sur le globe - ce n'est pas nécessairement une distance Euclidienne). Puis on regarde si cet élément est isolé ou s'il y en a plusieurs de regroupé (on parle de tubbing). Enfin on analyse les conséquences de la Prévision d'Ensemble et de ces éléments sur le temps sensible (on prévoit l'humidité à divers niveau, des températures adiabatiques, etc.. ensuite il faut les transformer en pluie et températures de l'air que j'appelle ici temps sensible). Ainsi, deux situations apparemment différentes peuvent donner le même type de temps sensible...

On ne conserve donc que les divergences en temps sensibles :

Là où cela se complique encore, c'est que la prévi d'indice 2 n'est pas forcément mauvaise. C'est à dire que la Prévision d'Ensemble est bonne, mais elle manque de précision ! Bref à l'échelle d'un continent elle est peut être excellente, mais à l'échelle de la France, on a du mal à préciser. Par ailleurs, cette méthode permet parfois d'éliminer des situations : par exemple, on ne sait pas trop quel temps il va faire, mais on sait qu'il ne fera pas plus chaud ou que l'on peut exclure une dégradation forte, etc.... Le plus difficile reste de "communiquer" ces informations !

Ainsi, à J+4 et J+5, on prévoit un temps s'améliorant par l'ouest mais restant instable sur le quart nord-est avec des averses. Les nuages s'accrochent sur le relief. Cela se rafraîchit de façon sensible. Cette prévision regroupe 29 éléments et il existe 7 tubes. Mais ces tubes ne concernent que le basculement ou non d'un "thalweg", et ne donne pas de fortes différences en temps sensible. La prévision a un indice de 3/5.

Les variantes envisageables impliqueraient :

  1. soit de l'instabilité sur le sud du pays
  2. soit un "raccourcissement" de la durée de l'accalmie prévue !

Mais l'arrivée du froid (et des premières gelées) reste confirmée dans tous les cas (ce qui ne veut pas dire que l'on en est certain à 100%).

A j+6 et j+7, le flux perturbé circule au nord du pays (pluie) et la moitié sud reste protégée par des pressions plus hautes. La Prévision d'Ensemble est moins dispersée avec 37 éléments et 4 tubes. L'incertitude reste sur la frontière "moitié" nord et "moitié" sud... L'indice est de 3/5. Il aurait pu être de 4/5 si il y avait eu moins de tubes. Mais on n'aurait donné que 3 / 5 car il est encore plus difficile de faire comprendre qu'une prévision à 6 et 7 jours soit meilleure qu'à 4 et 5 jours !

Enfin, il faut savoir qu'en moyenne, l'indice 3 / 5 devrait apparaître dans 50% des cas, l'indice 2/5 dans 25% et 4/5 également dans 25% des cas (environ et d'après des simulations).

Les premières statistiques établies avec les prévisions réalisées entre le 1er mai et le 16 juillet (77 jours, ce qui est peu pour conclure) montrent d'ailleurs que

Pour information, les prévisions sont réalisées de la même façon jusqu'à dix jours. Elles peuvent être diffusées sous forme probabiliste ("il y a 20% de chance d'avoir de la pluie supérieure à 1mm en 24 heures le 8ème jour" par exemple) mais la diffusion n'est prévue que sous forme commerciale (EDF s'y intéresse beaucoup). La prévision d'ensemble est également utilisée (sous une forme analogue tout du moins) pour des prévisions saisonnières. Mais, c'est la diffusion des résultats est confidentiel !

Pour conclure, on voit que l'avenir de la météo passe sur l'amélioration de l'outil informatique : plus les super calculateurs seront puissants (mémoire et vitesse de calcul), plus la maille sera fine sur le globe, et plus on pourra ajouter des éléments dans la prévision d'ensemble. Ainsi, en plus des différentes extrapolations possibles, on tiendra compte également des différentes façons de paramètre un modèle de prévision qui simule par des simplifications un ensemble d'équations différentielles complexes. On pourra également y introduire en continue des données satellitaires (ce qui n'est pas le cas actuellement faute de puissance de calcul et par manque de précision sur les mesures satellitaires) selon une procédure que l'on appelle aujourd'hui le 4D-Var.

Mais cette course à la puissance ne date pas d'aujourd'hui : la première idée d'une modélisation de l'atmosphère date de 1922 ; un anglais (L.F. Richardson) avait imaginé qu'avec 64 000 employés faisant des calculs et un grand nombre de coursiers pour faire passer l'information, on aurait pu faire des prévisions. C'est ce que font les ordinateurs aujourd'hui. Le premier modèle météo informatique date de la fin des années 1950. Il lui a fallu un mois de calcul pour réaliser une prévision à 24 heures ! Mais depuis la fin des années 60, les prévisions météo sont réalisées quotidiennement grâce aux calculateurs...

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Bruno BOUCHARD
METEO-FRANCE
Délégué Départemental de l'Yonne
Rue de la Tour
89000 St-Georges-Sur-Baulche
Tél. 03 86 42 00 10 - Fax : 03 86 46 85 13
E-Mail : Bruno.Bouchard@meteo.fr
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Pour en savoir plus :

Découvrons la météo - pour tous à partir de 10 ans - ouvrage de Didier Renaud, aux éditions circonflexe (nov. 1997)

La météo, Question de temps - très complet, belles photographies - ouvrage de René Chaboud, édition Nathan (juin 1993)

La météo de montagne - plus scolaire et plus tourné vers la montagne - ouvrage de Jean-Jacques Thillet, ches les éditions du Seuil, dans la collection "Les guides du Club Alpin Fraçais" (janvier 1997)

Climatologie - Méthodes et pratiques - ouvrage de référence pour tout savoir sur la climatologie. Mais approche très scientifique. ouvrage de R. Arléry, H. Grisollet, B. Guilmet, édité chez Gauthier-Villars (1973).

Il existe bien d'autres ouvrages (Météo Marine, Météo Plein Air (pour les aviateurs), Météo en Méditerranée, etc..

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